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Le principe du règlement Dublin est qu’un seul Etat européen est responsable de la demande d’asile d’une personne ressortissante d’un Etat tiers.

Le but étant d’interdire à la fois qu’un demandeur sollicite l’asile dans différents pays européens et que ne lui donne pas le choix du pays qui examinera sa demande.

Ce règlement est applicable aux 28 Etats membres de l’Union européenne et aux quatre pays associés en vertu d’accords : La Suisse, le Lichtenstein, l’Islande et la Norvège. 

La procédure peut prendre jusqu’à 11 mois à compter de l’introduction de la demande d’asile. Des délais plus courts s’appliquent si le demandeur est placé en rétention. 

Chiffres clés :

Selon les statistiques du ministre de l’intérieur et d'Eurostat, en 2018, un peu plus de 45 358 personnes  – mineures comprises – ont été des Dublinées pour un total de 122 743 demandes enregistrées par les préfectures (30%). En 2016, leur nombre était d’environ 22 000 et en 2015 de 11 700. Le nombre de transfert s’élève à 2 633 en 2017 (9% des 29 713 accords).

L’Italie est de loin le premier pays saisi avec 15 428 saisines avec un changement notable puisque 71% sont des reprises en charge. L’Allemagne est le deuxième pays saisi avec 8694 saisines. A noter que près de 21% des saisines vers ce pays sont faites sur le fondement d’une demande d’asile rejetée.

3 533 transferts ont été effectués en 2018 (2 633 en 2017 contre 1 293 transferts en 2016 et 525 en 2015). Cela représente 12% des accords et 8% des saisines. 1 798 transferts ont été effectués après une rétention (soit un peu de la moitié).

Comme les années précédentes, l’Ile de France concentre la moitié des personnes selon cette procédure.

Le rapprochement des données entre les rapports d’activité de l’OFPRA et celui de l’OFII permet d’avoir une estimation des demandes requalifiées par préfecture. Environ 20 000 personnes adultes ont vu leur demande requalifier en procédure OFPRA soit 23% des demandes introduites à l’OFPRA. 

Le système Dublin repose sur 3 textes de l’Union Européenne :

  • Le règlement « Dublin » du 26 juin 2013 n°604/2013 fixe les règles pour déterminer quel Etat sera responsable de la demande d’asile.
  • Le règlement d’exécution modifié le 30 janvier 2014 n°118/2014 en fixe les modalités concrètes en vue d’une application opérationnelle et commune du règlement Dublin
  • Le règlement Eurodac du 26 juin 2013 n°603/2013 qui créé un système de comparaison des empreintes digitales destiné à aider les Etat à connaître l’Etat responsable de la demande d’asile 

Déroulement du placement en procédure Dublin à la préfecture 

Le Règlement Dublin III précise que le processus de détermination « commence dès qu’une demande de protection internationale est introduite pour la première fois auprès d’un Etat membre » (article 20).

En France, la demande d’asile est réputée introduite lors son enregistrement au Guichet Unique. C’est lors de cette première convocation au Guichet Unique que la préfecture relève les empreintes digitales du demandeur pour la comparaison des empreintes dans le fichier Eurodac. Elle consulte également le fichier VIS.

Le demandeur a également l’obligation de coopérer avec l’administration et notamment d’indiquer son parcours avant son entrée en France et de présenter tous les documents d’identité et de voyage en sa possession afin d’aider à la détermination de l’Etat responsable (alinéa 3 de l’article L. 741-1).

En cas de résultat positif ou sur la base de documents du demandeur, la procédure « Dublin » est engagée (L. 741-1) et une attestation de demande d’asile « procédure Dublin » est délivrée.

Le même jour, l’agent préfectoral doit remettre les informations écrites au demandeur et procéder à un entretien :

Droit d’information (article 4 du Règlement): La préfecture a l’obligation de délivrer des informations écrites et ce « dès qu’une demande de protection internationale est introduite au sens de l’article 20 paragraphe 2 », c’est-à-dire dès l’enregistrement de la demande à la préfecture.

L’ensemble de ces informations précisées à l’article 4 sont regroupées dans 2 brochures Dublin annexées au règlement d’exécution n°118/2014. Elles contiennent également des informations relatives au fichier Eurodac que les autorités doivent communiquer au demandeur. Ces brochures sont traduites dans plusieurs langues.

La préfecture doit remettre ces brochures d’information dans la langue que le demandeur comprend (article 4-2).

Le droit à l’information Dublin est une garantie essentielle pour le demandeur d’asile. De fait, si l’une des brochures n’est pas remise (CAA Lyon, 26 mai 2015, n°14LY04080) ou si les brochures ne sont pas remises dans la langue du demandeur (TA Clermont, 2 juin 2016, n°1600872) ou si ces informations ne sont remises que tardivement (TA Lyon, 20 mai 2015, n° 1504482), la décision de transfert est susceptible d’être annulée par le juge administratif.

Droit à entretien individuel : Un entretien est mené dont l’objet est de permettre au demandeur de fournir des informations sur la présence de membre de sa famille dans l’Union européenne, de faciliter le processus de détermination et de permettre de veiller à la bonne compréhension des informations écrites remises par la préfecture (dernier alinéa de l’article 4-2).

Aucune disposition française ne réglemente l’entretien. Si la circulaire prévoit qu’il est effectué au guichet unique lors de l’enregistrement de la demande, le règlement précise qu’il doit avoir lieu en temps utile et avant la notification d’une décision de transfert (article 5-3) dans des conditions garantissant la confidentialité (article 5-5) et dans une langue que le demandeur comprend, au besoin avec l’assistance d’un interprète (article 5-4).

Un résumé de l’entretien doit être établi. Le demandeur doit avoir accès au résumé (5-6). En pratique, la préfecture remet une copie de la page d’entretien ou du formulaire entier.

L’entretien individuel est une garantie pour le demandeur d’asile. Si la préfecture n’a pas effectué d’entretien ou si celui-ci a été fait sans interprète (CAA Nantes, 30 juin 2015, n° 14NT00780), la décision de transfert est susceptible d’être annulée par le juge administratif.

  1. la détermination de l’Etat responsable

L’Etat, au sein duquel une personne sollicite l’asile pour la première fois sur le territoire européen, détermine l’Etat responsable de l’examen de sa demande d’asile en fonction de critères liés à la situation du demandeur. L’Etat doit examiner ces critères par ordre hiérarchique en considérant d’abord ceux relatifs aux liens familiaux puis ceux aux liens légaux avec un Etat membre et enfin ceux liés au lieu d’entrée du demandeur dans l’Union Européenne.

Si la situation du demandeur au regard d’un critère fait apparaître la responsabilité d’un autre Etat européen, ce dernier sera saisi par les autorités devant lesquelles le demandeur a sollicité l’asile pour prendre en charge l’examen de sa demande. On parle alors de prise en charge (Art.21 à 23).

Si l’Etat considéré comme responsable accepte cette responsabilité, le demandeur y sera transféré pour y demander l’asile.

Dans l’hypothèse où la procédure de détermination n’aboutit pas ou si les autorités n’engagent pas cette procédure, l’Etat saisi pour la première fois en Europe examine la demande et devient, dès lors, l’Etat responsable de l’examen de la demande d’asile. Si le demandeur quitte cet Etat et sollicite l’asile dans un autre Etat, les critères énoncés aux articles 8 à 14 ne s’appliquent pas. Le seul critère étant le lieu d’introduction de la demande, l’Etat où la demande d’asile a été déposée la 1ère fois sera responsable. Il s’agit de la reprise en charge (Art. 24).

Aussi, la prise en charge au regard des critères de détermination s’applique uniquement pour les personnes qui n’ont pas déposé de demande d’asile sur le territoire européen. Dans ce cas, l’Etat responsable doit prendre en charge l’examen de la demande d’asile et la mener à son terme.

Si le demandeur a déjà introduit une demande d’asile dans un autre Etat européen, ce dernier sera toujours l’Etat responsable et devra le reprendre en charge. Dans ce cas, l’Etat responsable devra poursuivre l’examen de la demande d’asile si celle-ci est encore en cours d’examen ou la reprendre si la demande avait été retiré (ex : abandon du demandeur). Si la demande d’asile a été rejetée, l’État est responsable mais n’a pas d’obligation d’examiner la nouvelle demande d’asile.

Dans certains cas précisés par le Règlement Dublin, la responsabilité de l’Etat peut cesser (articles 19 et cas de cessation aux articles 8 à 14) ou y être dérogée (articles 3.2 ; 16  et 17) conduisant généralement les autorités qui ont engagé la procédure Dublin à se reconnaître responsables de l’examen de la demande d’asile.

La clause humanitaire s’applique dans le cadre de la prise en charge et non dans une reprise en charge où elle ne peut donc être invoquée pour déroger à la responsabilité de l’Etat saisi. 

 

2. les critères pour déterminer l’Etat responsable 

Cas concerné

Critère de responsabilité

Cessation de responsabilité

 Mineur isolé

(Article 8)

L’Etat où réside régulièrement  le père, la mère ou autre responsable légal), frère ou sœur pour autant que ce soit dans l’intérêt supérieur  du mineur

Si pas de membre de famille résidant régulièrement dans un Etat européen, le dernier Etat où le mineur a introduit sa demande est responsable

Membre de famille d’un bénéficiaire de protection internationale

(Article 9)

L’Etat où réside régulièrement le conjoint et/ou les enfants mineurs en qualité de bénéficiaire d’une protection internationale[1] et avec leur accord par écrit

 

Membre de famille d’un demandeur d’asile

(Article 10)

L’Etat où séjourne le conjoint et/ou les enfants mineurs en qualité de demandeurs d’asile qui n’ont pas encore fait l’objet d’une 1ère décision sur le fond (ex ; OFPRA) et avec leur accord par écrit

 

Plusieurs membres de famille déposent simultanément une demande d’asile dans un Etat membre mais critères conduiraient à plusieurs Etats responsables différents et à les séparer

(Article 11)

L’Etat responsable de la prise en charge du plus grand nombre de ces membres de famille

Si égalité de nombre, l’Etat responsable du plus âgé des membres de famille

 

Délivrance de titre de séjour

(Article 12-1)

L’Etat ayant délivré un titre de séjour en cours de validité même en cas de fraude (12-5)

Si le titre de séjour est expiré depuis plus de deux ans (12-4) ou en si Etat responsable établit une fraude intervenue après délivrance du titre (12-5)

 Délivrance de visa

(Article 12-2)

L’Etat ayant délivré un visa en cours de validité (si délivrance au nom d’un autre Etat, ce dernier est responsable) même en cas de fraude (12-5)

Si visa est expiré depuis plus de 6 mois (12-4) ou en si Etat responsable établit une fraude intervenue après délivrance du titre

En cas de délivrance de plusieurs titres de séjour ou visas

(Article 12-3)

L’Etat ayant délivré le titre de séjour ou le visa de validité la plus longue

Si égalité, le document dont la date d’échéance est la plus lointaine

Si le titre de séjour est expiré depuis plus de deux ans (12-4) ou en cas de fraude (12-5)

Si visa est expiré depuis plus de 6 mois (12-4) ou en cas de fraude (12-5)

 

 Franchissement irrégulier d’une frontière extérieure

(Article 13-1)

L’Etat par lequel le demandeur a franchi irrégulièrement (par voie terrestre, maritime ou aérienne) sa frontière en venant d’un Etat tiers

Si la date du franchissement irrégulier a plus de 12 mois

Séjour irrégulier

(Article 13-2) 

L’Etat dans lequel le demandeur a séjourné irrégulièrement pendant une période continue d’au moins 5 mois, lorsque les conditions d’entrée sur le territoire des Etats membres ne peuvent être établies

En cas de plusieurs séjours continus d’au moins 5 mois, l’Etat sur lequel a séjourné en dernier le demandeur

 

Entrée sous exemption de visa

(Article 14)

L’Etat par lequel est entré légalement un demandeur exempté de visa

Si la demande d’asile est faite dans un autre Etat où le demandeur est également exempté de visa, c’est ce dernier Etat responsable

Demande d’asile à la frontière

(Article 15)

L’Etat sur la zone de transit international d’un aéroport duquel le demandeur présente sa demande

 

 


[1] Que la famille ait été ou non préalablement formée dans le pays d’origine

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